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Les trois pingouins
Une histoire de 3 pingouins vert fluo en Provence
Nos trois amis marchèrent longtemps, longtemps, sans regarder les traces laissées sur le sol aride, chaud naguère, gelé depuis bien longtemps par l’indifférence générale.
La circonspection, point de mise, laissait place à l’extravagance commerciale omniprésente,
à la vie tranchée infaillible, indiscutable, obligatoire, imposée.
Les rires se lisaient sur les strates du passé, enfoui sous les décombres de la modernité, trop sérieuse, trop prétentieuse, trop accaparante.
L’archéologue des sensations joyeuses n’en était pas à sa première découverte.
Les décombres de la sensibilité humaine constituaient son sujet de prédilection.
L’expression lâchée, débridée, heureuse, la spontanéité du dernier jour s’envolaient.
Bonjour la mine figée, convenue, inexpressive, consciente ou inconsciente, amimique, comme paralysée, traduisant un cerveau immobile, téléguidé, manipulé, conditionné, martelé sans cesse d’idées imposées, en cage avec de gros barreaux inviolables, sculptés violemment par le marketing incessant, la publicité envahissante guidant nos choix, nos envies.
L’homme devient civilisé.
Tout avis personnel, contrarié, délaissé, oublié, disparu, tout avis personnel devenu grossier, grotesque, trop primaire, primitif, primate, comme on aime à le dire.
Ces primates qu’on extermine dans l’indifférence tranquille, holocauste normalisé.
La pensée, le raisonnement, doivent être imposés, malaxés, clonés.
Point d’imagination, peu d’opinion personnelle, et même surtout pas d’opinion personnelle.
La fin des vacances s’annonçait, adieu liberté, sensations du jour, bon temps, sans polémique, sans contestation, sans contradiction, sans agression.
Adieu le temps qui coule, qui passe nonchalamment, sincèrement, suavement, généreusement.
Adieu temps de l’échange, du regard amoureux, sans contrepartie, du regard doux, tranquille, de l’amour qui prend son temps.
Adieu soleil de Provence à Joucas, eau fraîche, on se sent vivre, bonheur du jour, sensation magique, plaisir que tu nous donnes, plaisir que l’on se donne.
Mistral léger qui estompe la chaleur, qui rappelle le corps nu, vivant.
Mistral léger qui dépollue notre ère, notre esprit, notre chair.
Pollution de nos esprits, pollution de notre monde, adieu la beauté que l’on croque, que l’on mange, que l’on avale, que l’on caresse, que l’on imagine, dans laquelle on se roule, on se love, on s’y cache, on y resterait bien.
Le bonheur d’être soi, parmi les autres.
Le bonheur qu’ils soient eux avec moi, dans une construction positive, dynamique, optimiste.
Les trois pingouins vert fluo sortirent de la piscine, s’allongèrent sur l’herbe, s’endormirent et révèrent.
Les trois pingouins vert fluo révèrent, révèrent, révèrent, et se réveillèrent à Beloeil dans un monde tout en art.